Reflexion

Mobilité et Pratique

Lorsque le sabre descend du ciel, il n’y a que deux possibilités : la mobilité et la vie ou l’immobilité et la mort. Au niveau symbolique, bien entendu car l’éthique et le cadre du tatami nous préservent de cette extrémité. Dans la nature, il en est autrement : un torrent qui s’écoule mal est voué à disparaître, un animal réduit à l’immobilité est vite condamné.

Par la répétition des gestes, l’aïkido nous apprend à mobiliser notre corps et notre énergie pour agir. L’aikishintaiso nous apprend à mobiliser notre esprit ; à le rendre libre quand une  douleur apparaît, à ne pas le laisser s’y enfermer.

La souffrance semble toujours liée à une absence de mouvement : c’est lorsque qu’aucun chemin ne semble empruntable que la souffrance apparaît. Et pourtant, il suffit souvent de faire un pas et de porter son regard ailleurs pour voir l’espace qui nous est offert. Le conflit se cristalise toujours dans cet espace restreint qui se situe entre nous et l’autre ou entre ce que nous sommes vraiment et ce que nous croyons montrer. Se mobiliser, c’est donner à son corps et à son esprit l’espace nécessaire qui permet de prendre un autre point de vue sur la situation et ainsi de l’objectiver. Vous avez sans doute déjà fait ce travail où saisi en Yonkyo par les deux bras, la première réaction est de se raidir et de ne percevoir aucun échappatoire. Et pourtant, vos mains sont libres, vos poignets sont libres, vos coudes sont libres, vos épaules sont libres, votre bassin est libre mais qu’en est-il de votre esprit ?

La mobilité dans la pratique, vous la vivez déjà à chaque attaque, vous la travaillez sur chaque posture. C’est un premier pas qui ne demande qu’à grandir.

Une autre mobilité est possible : celle qui conduit à vous confronter à d’autres altérités. Les occasions sont nombreuses de se mobiliser pour rencontrer d’autres pratiquants. En Normandie, je vous invite à aller visiter les dojos de Bois Guillaume, du Mesnil Esnard, de Rouen, de la Saussaye, de la Haye Malherbe (cf. https://www.aikido-normandie.org/dojo/ pour les adresses exactes) à ces occasions. Un cours à Lille,  à Paris, La participation à un week end de pratique plus intensive, une découverte du dojo Kobayashi Ryu à Bourg Argental ou plus loin dès que les conditions seront à nouveau favorables. Cette pratique est ouverte à tous, elle n’est pas réservée aux « anciens », il suffit d’ouvrir le regrad pour voir que cela vous est ouvert.

En ces temps de confinement, de limitations répétées, il est important de rester mobile, dans son corps et dans son esprit, de ne pas laisser ces contraintes nous alourdir : apprécier une lumière un soir sur les quais de Rouen, une marche en bord de Seine, la pratique du sabre dans un jardin à la tombée de la nuit.

Distanciation sociale et Aikido

La crise sanitaire du COVID19 a conduit à l’émergence de l’expression distanciation sociale pour désigner un espace entre individus permettant de minimiser le risque de contamination. Il y aurait donc une bonne distance qui offrirait les conditions sanitaires satisfaisante et des distances plus « risquées » synonymes d’un danger pour l’individu.

 

Il est intéressant de voir que cette notion de distance (symboliquement de vie ou de mort) est proche d’une notion importante dans les arts martiaux. En aikido, la distance de travail est celle, lorsque les 2 partenaires sont de profil, qui nous met à une distance d’un pas d’une attaque d’un partenaire. Plus proche et le partenaire peut attaquer sans bouger de sa position ce qui ne donne pas les conditions d’espaces nécessaires, pour l’attaqué, à l’absorption et à l’exécution de la technique, plus loin et c’est la relation entre les 2 individus qui n’est plus possible comme si les 2 partenaires évoluaient dans deux espaces sans interactions réelles possibles (rupture du ki no musubi, lien entre les centres).

Il est intéressant de faire le parallèle avec la distanciation sociale, trop proche et c’est le risque de contamination, trop loin et c’est le risque d’isolement.

La pratique de l’aikido donne au corps les outils pour intégrer ces distances par la répétition d’une attaque ritualisée, celle-ci variant sans cesse en fonction des armes (ou non) des deux partenaires : jo-jo, jo-bokken, jo-mains nues, bokken-bokken, bokken-tanto, bokken-mains nues, tanto-mains nues, mains nues-mains nues. Le corps apprend petit à petit quelles distances sont bénéfiques à la réalisation de la technique et quelles distances l’en empêchent.

Pendant le temps que subsisteront les restrictions liées à la crise sanitaire (pas de contact), nous travaillerons sur des espaces adaptés avec les armes (jo-jo, jo-bokken, bokken-bokken) comme présentés dans la vidéo ci dessous :